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Publié par La Pluie du Dharma

Paramârtha-gâthâs ( 12 ème partie )

 

 

38. Lorsque nous souffrons, nous reconnaissons la souffrance
« Je souffre » ou « je suis heureux ».
La discrimination engendre des vues.
Ceci engendre cela, et cela engendre ceci.

 

39. Le mental impur naît et cesse
Ensemble avec les afflictions.
La libération n'a lieu
Ni avant ni après les afflictions.

 

40. Ce n'est pas après la naissance de ceci
Que la pureté va naître.
Ce phénomène qui avant était pur
Est appelé 'libre des affliction.'

 

41. Tout ce qui est impur
Est pur dans sa vraie nature.
Sans objet pur,
Comment y aurait-il un sujet pur ?

 

(cloche)

Chère Sangha, aujourd'hui nous sommes le dimanche 15 Janvier de l'an 2012, nous sommes dans la salle de méditation de l'Assemblée des Étoiles au Hameau du Bas au Village des Pruniers pendant la retraite d'hiver 2011-2012.

 

Je laisse le Bouddha respirer, je laisse le Bouddha s'asseoir

Au Village des Pruniers, nous avons ce gatha que nous pratiquons: 'Je laisse le Bouddha respirer, je laisse le Bouddha s'asseoir pour moi', et ce gatha est extraordinaire. La respiration est un art. La marche est aussi un art. Il y a une manière de respirer qui nous apporte beaucoup de paix et de bonheur. Il y a une manière de marcher qui nous apporte beaucoup de paix et de bonheur. C'est un art. Alors toutes les personnes qui viennent ici doivent apprendre à respirer, à marcher, à s'asseoir. On s'assoit de manière qu'on soit en paix, qu'on soit heureux. On respire de manière qu'on soit paisible et heureux. On marche de manière qu'on soit paisible et heureux. Et il y a d'autres pratiques, comme celle du repas en pleine conscience. On prend son petit déjeuner de manière qu'on soit paisible et heureux. On se brosse les dents de manière que pendant tout se temps, on soit paisible et heureux. On défèque de manière qu'on soit paisible et heureux. Et quand on y arrive, quand on est heureux pendant la respiration, pendant la marche, pendant les repas, pendant que l'on se brosse des dents, alors on pourra aider les autres à faire de même. Parmi nous, il y en a qui sont capables de le faire. Il y en a qui s'assoient dans le bonheur, qui respirent dans le bonheur, qui marchent dans le bonheur. Et nous savons que le Bouddha est heureux en respirant. Le Bouddha est heureux en marchant. Le Bouddha est heureux en étant assis. Et il y a des moments où nous sommes très heureux quand nous sommes assis, il y a des moments où nous sommes très heureux quand nous respirons, il y a des moments où nous sommes très heureux quand nous marchons. Alors nous savons que le Bouddha peut le faire. Sa manière de respirer, de marcher, de s'asseoir lui apporte beaucoup de bonheur. Parce que nous avons traversé des expériences, il y a eu des moments où nous étions heureux, pendant la marche, pendant l'assise, alors nous savons que le Bouddha est en nous. Il est en nous. Je prends refuge dans le Bouddha en moi. Je l'invite à respirer pour moi, à marcher pour moi, à s'asseoir pour moi. Parce que nous savons que si c'est le Bouddha qui respire, qui marche, qui s'assoit, alors la qualité de l'assise, de la marche, de la respiration, est très élevée. Alors à chaque fois qu'on s'assoit, on invite le Bouddha à s'asseoir avec nous. À chaque fois que nous marchons, nous l'invitons à marcher avec nous, à marcher avec nos deux pieds. Si c'est le Bouddha qui marche, la qualité de la marche est très élevée, et nous pouvons en profiter. Alors nous avons le gatha: 'Je laisse le Bouddha respirer, je laisse le Bouddha marcher, je laisse le Bouddha s'asseoir'. Le Bouddha n'est pas une réalité à l'extérieur de nous-même, mais il est en nous.

 

Le Bouddha respire, le Bouddha est assis

Dans le bouddhisme, nous avons appris que nous avons tous la nature de Bouddha en nous. Nous avons le corps du Bouddha en nous, et si nous savons chérir et entrer en contact avec cette nature du Bouddha en nous, cela deviendra une source d'énergie. Et quand nous utilisons cette énergie pour respirer, pour marcher, pour nous asseoir, alors nous sommes heureux, parce que le Bouddha respire, marche et s'assoit toujours avec la pleine conscience, la concentration et la vision profonde. Chaque pas est capable de nous nourrir, chaque pas peut nous guérir, chaque pas nous aide à nous arrêter. Nous ne courons plus, nous ne cherchons plus rien. Et nous savons que nous pouvons faire de tels pas. Nous avons déjà fait de tels pas, alors nous savons que le Bouddha est en nous, et si nous pratiquons régulièrement, nous pouvons marcher ainsi. Quand nous invitons le Bouddha à respirer, marcher et s'asseoir avec nous, la qualité de l'assise est très élevée, la qualité de la marche et de la respiration est très élevée, et ainsi nous sommes heureux pendant tous ces actes. Le deuxième gatha est : 'Le Bouddha respire, le Bouddha s'assoit. J'ai la chance de respirer, j'ai la chance de marcher.' La pratique de ce verset nous apporte beaucoup de bonheur. Nous avons un dos. Nous invitons le Bouddha à s'asseoir avec notre dos. Et quand le Bouddha utilise notre dos pour s'asseoir, notre dos est bien droit. Quand le Bouddha s'assoit, il est détendu, alors quand nous invitons le Bouddha à s'asseoir avec nous, nous sommes détendus aussi. Alors nous nous pouvons pratiquer ce verset : 'Le Bouddha respire, le Bouddha est assis. J'ai la chance de respirer, j'ai la chance de m'asseoir.' Et nous pouvons continuer à pratiquer ce verset, nous n'avons pas hâte de passer à un autre exercice, nous pouvons simplement continuer avec celui-ci pour pouvoir bien en profiter.

 

Le Bouddha est la respiration, le Bouddha est l'assise

Les deux premiers gathas sont pour s'arrêter et toucher la paix. Et le troisième gatha concerne la contemplation, le regard profond : 'Le Bouddha est la respiration, le Bouddha est l'assise. Je suis la respiration, je suis l'assise.' Nous reconnaissons le Bouddha par la qualité de la respiration, de l'assise, parce qu'il n'y a que le Bouddha qui soit capable de respirer et de s'asseoir comme ça. C'est pour cela qu'on dit : 'Le Bouddha est la respiration, le Bouddha est l'assise.' Si quelqu'un d'autre respire et s'assoit, la qualité ne sera pas aussi bonne. 'Le Bouddha est la respiration, le Bouddha est l'assise.' Cette assise a beaucoup de qualité, et en regardant la posture de l'assise, nous comprenons que c'est le Bouddha, parce que si c'était quelqu'un d'autre que le Bouddha qui était assis, alors la qualité de l'assise ne serait pas si élevée. Quand nous regardons la qualité de la respiration, nous voyons qu'elle est très légère, profonde, calme, en pleine conscience, et qu'elle apporte la relaxation, alors nous comprenons qu'il n'y a que le Bouddha qui puisse respirer comme ça. Ainsi, nous comprenons que ce n'est pas la peine de chercher le Bouddha à l'extérieur de la posture d'assise ou à l'extérieur de la respiration. C'est dans la respiration qu'on trouve le Bouddha, c'est dans la posture d'assise qu'on trouve le Bouddha. Il ne faut pas chercher le Bouddha à l'extérieur de tout cela, à l'extérieur de la posture d'assise et de la respiration. C'est très important, c'est la vision profonde. Le jour de Noël, les soeurs du Hameau Nouveau ont offert aux frères du Hameau du Haut une imprimante, parce que les frères n'ont pas une bonne imprimante et ils en ont besoin. Et les soeurs ont dit aux frères : 'Quand vous l'utilisez, il faut l'utiliser correctement. Dans la brochure d'instruction, les soeurs ont écrit : 'Il y a l'action d'imprimer mais il n'y a pas d'imprimeur.' Seule l'action d'imprimer existe, il n'y a pas d'imprimeur.' Et nous pouvons voir cela très clairement : nous appuyons sur un bouton, et nous voyons l'imprimante travailler. Il y a seulement le fonctionnement, l'action d'imprimer, mais on ne voit personne qui imprime. Alors les soeurs du Hameau Nouveau ont dit aux frères qu'en imprimant, il faut être conscient qu'il y a l'action d'imprimer, mais qu'il n'y a pas d'imprimeur. Quand nous invitons le Bouddha à respirer et à s'asseoir, il ne faut pas croire qu'il y a un Bouddha à l'extérieur de la respiration et de l'assise. Non. Le Bouddha est la respiration. Le Bouddha est l'assise. Il ne faut pas le chercher à l'extérieur de cela. Quand nous disons : 'Il pleut', nous pouvons voir deux choses : la pluie, pleut, et celui qui pleut, il. Il y a celui qui pleut afin de pleuvoir. Mais en fait, il y a seulement la pluie, il n'y a personne qui fait la pluie, il n'y a pas le sujet à l'extérieur de la pluie. Et quand on dit : 'le vent souffle', il y a le verbe souffler et le sujet du souffle, le vent, et on peut penser que le vent parfois souffle, et parfois ne souffle pas. On dit 'le vent souffle', mais on ne dit jamais 'le vent ne souffle pas.' Si n'y a pas de souffle, alors il n'y a pas de vent. L'action de souffler est le vent. À l'extérieur de l'action de souffler, il n'y a pas de vent. Si nous croyons que le vent est là, et qu'à l'extérieur du vent il y a une personne qui souffle, ce n'est pas correct. Il n'y a pas de souffleur derrière. Le vent est celui qui souffle (The wind is the blower). Et c'est pareil pour la respiration. Le Bouddha est la respiration, le Bouddha est l'assise. Il ne faut pas chercher le Bouddha à l'extérieur de la respiration et de l'assise. Et quand nous comprenons qu'il n'y a que la pluie, et qu'il n'y a personne qui fait la pluie, et quand nous comprenons qu'il y a le vent mais pas de souffleur, alors nous comprenons aussi qu'il n'y a que l'assise et la respiration, et pas quelqu'un qui soit assis et de respireur. Il n'y a que l'action d'imprimer, il n'y a pas d'imprimeur. C'est une vision profonde que nous devons réaliser. Si nous ne réalisons pas cela, nous sommes emprisonnés dans l'attachement au sujet, au soi. Le Bouddha est l'assise, le Bouddha est la respiration. Nous sommes la l'assise, nous sommes la respiration.

 

La rivière des cinq skandhas

Il est impossible de trouver un soi séparé. Ceci est l'enseignement le plus important dans le bouddhisme. Si nous voulons transformer la souffrance, nous devons comprendre le non-soi. En nous regardant, que voyons-nous ? Nous voyons un corps physique, la forme. Que voyons-nous d'autre ? Nous voyons des sensations. Quoi d'autre ? Nous voyons les perceptions. Quoi d'autre ? Nous voyons les formations mentales. Quoi d'autre ? Nous voyons la conscience. Et toutes ces choses inter-sont et coulent comme une rivière. En dehors de ces cinq agrégats qui forment cette rivière, il n'y a pas de sujet indépendant qui soit à l'extérieur. Il n'y a pas de soi. Par exemple, nous disons : 'La rivière coule.' Qu'est-ce que la rivière ? La rivière est le rassemblement de nombreuses gouttes d'eau qui coulent. En dehors de ces gouttes d'eau, il n'y a pas de rivière qui soit à l'extérieur. Il n'y a que des gouttes d'eau qui coulent. Il n'y a pas de rivière en dehors de cela. Nous sommes pareils : nous sommes le rassemblement des cinq skandhas, forme, sensations, perceptions, formations mentales, conscience, qui coulent continuellement, et il n'y a pas de sujet séparé, inchangeant, permanent, de soi séparé. Mais souvent, nous avons l'impression qu'il y a quelque chose de permanent, d'inchangeant, qui se trouve derrière les cinq agrégats. Les cinq agrégats changent sans cesse, mais nous avons la perception erronée qu'il y a quelque chose qui est permanent et qui ne change pas, le soi ou l'âme. C'est une construction mentale, la discrimination, vikalpa en sanskrit. Et toutes les souffrances que nous subissons sont basées sur l'idée d'un soi séparé, permanent et inchangeant. Nous croyons qu'il existe une âme, un soi, qui existe séparément, qui se trouve derrière les cinq agrégats. Et quand notre corps se décompose, que nos sensations et nos perceptions ne sont plus, nous pensons que notre soi existe toujours, et continue sous une autre forme. Il monte au paradis ou descend en enfer. Ceci est une vue erronée. C'est une vue erronée que l'on appelle dans le bouddhisme l'éternalisme. La vue qu'il existe un soi permanent, inchangeant, séparé, éternel. Les autres choses comme le corps, les sensations, les perceptions, les formations mentales, la conscience, peuvent changer, mais ce soi existe toujours, et il ira au paradis ou en enfer. Cette vue est une vue erronée. C'est la vue de la permanence, la vue de l'éternalisme. Et il une autre vue opposée à celle-ci : quand ce corps se décompose, il n'y a plus de sensations, plus de perceptions, plus de formations mentales, il ne reste plus rien, il n'y a plus rien du tout, c'est la mort, c'est la fin. C'est une autre vue erronée que l'on appelle la vue d'annihilation. Ces deux vues opposées sont des vues erronées, et la vue juste transcende ces deux vues erronées. C'est la voie du milieu. Ce n'est ni l'éternalisme ni l'annihilation. Rien ne naît et rien ne meurt. Il n'y a que la continuation. Par exemple, quand le nuage n'est plus un nuage, il continue sous la forme de la pluie, et la pluie va rejoindre le rivière, et il continue. La nature du nuage n'est ni celle de l'éternalisme ni celle de l'annihilation. Dans le bouddhisme, nous commençons avec la contemplation de la vacuité, la contemplation de l'impermanence, qui nous permet de voir que rien n'est immobile, que tout change. Tout change très rapidement, à chaque instant, à chaque ksana, qui est la période de temps la plus courte. Et parce que toutes les choses sont impermanentes, elles peuvent seulement exister en un ksana ; dès l'instant suivant, elles laissent leur place à d'autres choses. Comme la flamme : nous croyons qu'il y a une flamme qui continue toujours, mais en réalité, la flamme est comme une rivière : elle existe seulement un ksana, il y a une succession de milliers de flammes qui naissent et meurent. Et notre corps est pareil :si nous observons attentivement, nous voyons que nous étions tout petit à la naissance, et à l'âge de cinq ans, notre corps était différent, et à l'âge de dix ans, notre corps était encore différent, et votre corps est maintenant différent du celui du bébé. Les choses sont impermanentes, y compris notre corps, nos sensations, nos perceptions. En comparant notre corps à l'âge de cinq, et notre corps d'aujourd'hui, nous voyons qu'il est différent. Si nous disons que nous sommes un avec cet enfant à l'âge de cinq ans, ce n'est pas correct. Nous sommes tellement différent aujourd'hui. Et si nous disons que nous sommes une toute autre personne que cet enfant de cinq ans, ce n'est pas correct non plus. Entre l'enfant et nous, il y a un lien, une continuation. Samtati pravaha en sanskrit.

(cloche)

Tu as raison seulement en partie

En ce qui concerne le temps, nous sommes impermanents. En regardant dans le temps, nous voyons que nous sommes impermanents, que nous changeons sans cesse. Nous ne sommes pas les mêmes qu'il y a cinq minutes. Et en ce qui concerne l'espace, cette impermanence devient le non-soi. Qu'est-ce que le soi ? Le soi est quelque chose de permanent, le soi est quelque chose qui est toujours pareil, mais quand nous observons, nous ne trouvons rien qui soit permanent, qui soit inchangeant. Croire en un soi permanent en nous est une vue erronée. Cette vue erronée est l'éternalisme, et la vue opposée est celle de l'annihilation. Et la vue juste nous libère de ces deux extrêmes, de ces deux opposés. D'un côté, c'est l'éternalisme, et de l'autre côté, c'est l'annihilation. Pendant la méditation assise, nous pouvons nous regarder en profondeur, et voir que nous sommes une continuation. Nous sommes la continuation de notre père, de notre mère, de nombreux ancêtres. Nous ne sommes pas entièrement notre père, nous ne sommes pas entièrement notre mère, mais nous sommes leur continuation. Nous sommes aussi la continuation de nos grands-parents, de nos ancêtres. Nous sommes un courant continuel. Nos ancêtres, nos grands-parents, nos parents continuent en nous. Nous sommes un courant continuel. Et quand nous reconnaissons que nous sommes un courant continuel, nous pouvons nous libérer de l'idée du soi. En vivant dans une communauté, que nous soyons heureux ou non dépend du fait que nous voyons cela ou non. Si nous nous acceptons, nous pouvons accepter les autres. Si nous voyons qui nous sommes et que nous nous acceptons, nous voyons qui sont les autres et nous pouvons les accepter. Et au contraire, si nous ne pouvons pas nous accepter, nous ne pouvons pas accepter les autres. Si nous avons le complexe d'infériorité, nous sommes en colère avec nous-même. Et quand nous ne nous acceptons pas, comment pouvons nous accepter les autres ? Et si nous ne nous acceptons pas, nous ne pouvons pas vivre heureux. Alors le bonheur de la communauté est fondé sur l'acceptation. Nous devons commencer comme ceci : 'Je m'accepte tel quel. Je suis un courant continuel de mes ancêtres. Mes ancêtres sont ainsi. Leur comportement est ainsi. En moi, il y a des talents et des faiblesses, et je les accepte tous. Cela ne veut pas dire que je suis impuissant. Avec la pratique, je peux me transformer les faiblesses de mes ancêtres.' Grâce à la pleine conscience, vous pouvez accepter l'héritage de cette rivière, de ce courant continuel, et vous pouvez changer, améliorer. Ainsi l'acceptation et l'aspiration peuvent aller ensemble. Et quand quelqu'un nous regarde et nous fait des louanges ou nous critique, si nous avons cette vision profonde, nous ne souffrons pas, parce qu'en nous regardant, nous voyons les talents aussi bien que les faiblesses. Nous avons tous des talents et des faiblesses, mais ces talents et ces faiblesses n'appartiennent pas à un soi, mais ils sont parviennent tous d'une transmission. Comme la rivière, formée par de nombreux courants, il faut tout accepter, les talents comme les faiblesses. Et cette acceptation nous apporte la paix. Il faut accepter que nous avons des talents et des faiblesses, c'est très important. Et quand quelqu'un nous loue ou nous critique, nous pouvons nous dire : 'oui, c'est vrai, mais en partie, parce qu'en moi, il y a d'autres choses aussi.' Et ainsi, nous pouvons me libérer des complexes. Sans cette vision profonde, si les gens continuent à nous faire des louanges, nous pourrions nous sentir supérieurs, alors quand quelqu'un nous fait des louanges, nous pouvons répondre : 'Tu as raison en partie.' On n'a pas besoin de lui répondre tout de suite comme ça, mais dans nos pensées, nous nous disons :'Oui, tu as raison en partie, mais tu n'as pas tout vu.' Ainsi, on pourra maintenir son humilité, sans devenir arrogant ou trop fier. Et si quelqu'un nous critique, nous dit : 'Tu ne vaux rien, tu as trop de faiblesses', alors c'est pareil, nous pouvons nous dire : 'Oui, cette personne a raison, mais seulement en partie, il n'a pas tout vu, j'ai d'autres choses positives aussi.' Et on peut lui répondre verbalement, ou bien silencieusement : 'Vous avez raison seulement en partie.' C'est le sixième mantra. Et nous pouvons prononcer ce mantra ou le dire intérieurement. Si quelqu'un nous fait des louanges, nous pouvons nous dire : 'C'est vrai, mais seulement en partie, il y a encore d'autres choses.' Nous acceptons les deux côtés, les bonnes et les mauvaises choses. Et quand nous nous acceptons, nous sommes en paix. Quand nous nous acceptons, nous sommes capables d'accepter les autres aussi. C'est extraordinaire. Nous les acceptons tels qu'ils sont, et au lieu de juger notre frère ou notre soeur, nous pouvons espérer qu'avec la pratique, ils feront mieux. Et cet espoir n'est pas une pression ou un jugement. Parce que nous nous comportons de cette manière avec nous-même, nous reconnaissons les faiblesses aussi bien que les qualités chez les autres. Nous les acceptons tous et nous sommes en paix. Et personne ne nous empêche d'avoir une aspiration de nous améliorer. Avec la pratique, nous pouvons transformer nos faiblesses, et si nous avons cette aspiration en nous, nous pouvons aussi avoir cette aspiration pour les autres. Alors au lieu de critiquer, il faut d'abord nous accepter, et accepter l'autre personne. Au lieu de dire :'Tu fais toujours des erreurs', il faut arroser la fleur chez l'autre personne, et elle sera plus heureuse. Dans la communauté, il y a des personnes qui sont très sensibles, et la moindre critique les affecte beaucoup. Et quand nous acceptons nos faiblesses aussi bien que nos talents, nous sommes en paix. Et quand nous regardons les autres, nous les acceptons. Et quand nous acceptons, il y a l'acceptation dans notre regard, et quand nous regardons l'autre personne ainsi, elle est très heureuse. Par contre, si nous regardons les autres d'une autre façon critique, ils vont souffrir. Alors nous devons tous apprendre à regarder les autres avec l'oeil d'acceptation. 'Cher frère, chère soeur, je t'accepte comme tu es.' L'acceptation doit rayonner de notre regard. Même si cette personne a beaucoup de faiblesses, nous espérons qu'elle va se transformer. Nous voyons que cette personne a des faiblesses, mais nous savons qu'elle a aussi beaucoup de qualités. Il n'y a personne qui n'a pas de qualités. Alors si quelqu'un nous critique, nous devons utiliser cette vision profonde pour nous rappeler : 'Il a raison seulement en partie. Il n'a pas vu les autres parties en moi.' On ne peut pas tout voir chez quelqu'un, alors comment pourrait-on espérer que les autres voient tout chez nous ? Alors vivant dans une communauté, vivant dans une société, il nous faut cette humilité. Il faut voir que nous n'avons pas de soi séparé. Nous sommes la continuation de nos ancêtres. Tous les talents, toutes les qualités que nous avons, il ne faut pas croire qu'ils sont à nous. Non, ils ont été tous transmis par nos ancêtres. Ils n'appartiennent pas à notre soi. Nous pouvons avons beaucoup de reconnaissance envers nos ancêtres, car ils nous ont transmis toutes ces belles qualités. Si nous avons un corps physique en bonne santé, un beau corps, il ne faut pas être fier, parce que ce corps vient de nos ancêtres, il ne nous appartient pas. Et si nous avons quelques faiblesses, quelques mauvaises habitudes, tout cela vient aussi de nos ancêtres. Il ne faut pas nous emprisonner dans notre petit soi et nous mettre en colère contre nous-même. Nous nous acceptons comme nous sommes, nous acceptons nos talents comme nos faiblesses. Et nous accepter ne signifie pas que nous voulons garder ces faiblesses en non. Non, avec la pratique, nous pouvons développer nos talents et nous pouvons transformer nos faiblesses. Et si nous pouvons nous comporter de cette manière envers nous-même, nous pouvons faire de même avec les autres. 'Cher frère, chère soeur, je t'accepte comme tu es. Tu es mon frère, tu es ma soeur.' Et l'autre personne va être très heureuse. Mais cela ne veut pas dire que l'on ne souhaite pas qu'elle s'améliore, qu'elle puisse transformer ses faiblesses. Alors le mantra que Thay propose est :'Tu as raison en partie.' Quand quelqu'un nous fait des louanges, ces louanges sont vraies en partie. Et quand quelqu'un nous critique, ses critiques sont vraies en partie. Nous tous, nous avons des faiblesses et des qualités. Il ne faut pas laisser les louanges ou les critiques nous faire souffrir. Et quand nous faisons des louanges, ou quand nous faisons des critiques, il faut faire attention, il ne faut pas développer l'égo de l'autre personne, il ne faut pas augmenter leur sentiment de supériorité et d'infériorité.

 

(cloche)

En résumé, premièrement, nous disons qu'il n'y a pas de soi séparé. Il n'y a pas de soi séparé, il n'y a qu'un courant continuel. Un courant continuel et interdépendant. Nous devons nous souvenir que nous n'avons pas de soi séparé, nous sommes seulement un courant de nos ancêtres. Nous sommes nos ancêtres, nous sommes nos parents.

 

Deuxièmement, nous devons accepter toutes les qualités et les faiblesses, dans ce courant continuel et interdépendant. Il y a une rivière qui reçoit de nombreux courants d'eau. Votre mère est un courant, votre père est un autre courant, votre grand-mère, et ainsi de suite, et vous êtes cette rivière recevant tous ces courants. Certains courants sont très limpide, et d'autres sont boueux, et il faut tous les accepter.

 

Troisièmement, l'aspiration, le souhait. Que souhaite-t-on ? Nous souhaitons cultiver et transformer. Nous souhaitons cultiver ce qui est bien, nos qualités, et transformer et purifier les éléments qui sont encore négatifs en nous. Nous souhaitons que la rivière soit plus claire. C'est ce que nous faisons pour nous-même. Et quand nous arrivons à faire tout cela pour nous-mêmes, nous pouvons aussi le faire pour les autres. Nous regardons les autres et comprenons qu'ils n'ont pas de soi séparé, qu'ils sont des courants continuels et interdépendants. S'ils ont telles qualités, c'est parce qu'ils les ont reçues de leurs ancêtres, et s'ils ont telles faiblesses, c'est aussi parce qu'ils les ont reçues de leurs ancêtres. Il faut les accepter telles qu'elles sont. Il faut avoir cette vision profonde : une fois qu'on a cette vision profonde, notre regard est différent. Dans notre regard, il y a l'acceptation. 'Cher frère, je t'accepte comme tu es. Chère soeur, je t'accepte comme tu es.' Et quand on regarde les autres ainsi, les autres souffrent beaucoup moins. Parmi nous, il y en a qui sont très sensibles, et un simple regard avec un peu de jugement peut causer leur beaucoup de souffrance, comme un oiseau déjà atteint par une flèche croit, dès qu'il voit quelque chose un peu courbé, que c'est un arc. Nous devons pratiquer à regarder tout le monde avec l'oeil d'acceptation. Nous savons que la compréhension entraîne toujours l'amour. Si nous voulons aimer et que nous ne comprenons pas, comment pouvons nous aimer ? Il faut comprendre que l'autre personne n'a pas de soi séparé. Elle est simplement un courant continuel et interdépendant. Elle a reçu toutes les qualités et toutes les faiblesses de ses ancêtres. Il faut accepter nos frères, nos soeurs, tels qu'ils sont. Il y a trois jours, Il y a quelques jours, les frères au Hameau du Haut ont accepté trois aspirants pour l'ordination, et Thay les a amenés hier à une marche méditative à Son Ha. Quand on sait que la Sangha nous accepte pour recevoir l'ordination, on est très heureux. Alors nous devons nous entraîner à regarder tout le monde avec le regard d'acceptation. 'Cher frère, chère soeur, je t'accepte comme tu es.' Et cela ne veut pas dire que nous n'avons pas de souhaits. Nous souhaitons : 'Cher frère, chère soeur, tu as des qualités que tu devrais cultiver pour ton bonheur et le bonheur de la Sangha. Tu as aussi des faiblesses, et grâce à l'énergie de la Sangha, tu pourras les transformer petit à petit, comme ça tu seras plus heureux et la Sangha sera plus heureuse.' Si on arrive à parler comme cela et à regarder avec acceptation, le bonheur va augmenter dans la Sangha. Notre regard dit beaucoup. Parfois, on ne dit rien, mais nos yeux disent beaucoup. Alors il faut avoir la vision profonde, pour que nos yeux puissent offrir l'acceptation. Nous sommes une grande famille, et nous devons nous accepter pour être heureux et pour pouvoir apporter le bonheur aux autres.

 

Alors à partir de maintenant, quand quelqu'un nous fait des louanges, au lieu de devenir très fier, nous pouvons dire : 'Tu as raison en partie.' Et si quelqu'un vous critique, nous pouvons dire : 'Tu as raison, mais en partie. Je ne suis pas entièrement comme ça, j'ai des qualités aussi.' Et c'est la vérité. Et nous pouvons mettre en pratique ce sixième mantra silencieusement. Il nous protège de l'arrogance et nous protège des blessures. Si quelqu'un nous fait des louanges ou nous critique, nous disons ce mantra : 'Tu as raison seulement en partie.' Et avec de faire des louanges ou des critiques à une autre personne, nous savons que l'autre personne va dire ce mantra silencieusement : 'Tu as raison seulement en partie.' Maintenant, Thay vous regarde vous tous avec ces yeux d'acceptation, et Thay a aussi des souhaits.

 

Trente-huitième verset :

38. Lorsque nous souffrons, nous reconnaissons la souffrance
« Je souffre » ou « je suis heureux ».
La discrimination engendre des vues.
Ceci engendre cela, et cela engendre ceci.

 

Quand nous avons une vue fausse du soi, quand la souffrance la joie apparaissent, au lieu de dire qu'il y a la souffrance ou la joie, nous disons : 'Je souffre', ou 'Je suis joyeux.'. Mais lorsque la souffrance se manifeste, il faut dire simplement que la souffrance se manifeste. Pourquoi dire : 'Je souffre ?' Lorsque la joie se manifeste, il faut dire : 'La joie se manifeste.' Pourquoi dire : 'Je suis joyeux ?' Il n'existe pas de soi séparé. Ce qui existe, c'est la souffrance et la joie, il n'y a pas de 'je' derrière. Comme il n'y a pas d'imprimeur : il y a l'action d'imprimer, mais pas d'imprimeur. C'est la différence. Quand il y a la tristesse, la souffrance ou la colère qui se manifeste, il faut dire qu'il y a la tristesse, la souffrance ou la colère, qui se manifeste. Il ne faut pas dire 'je souffre', 'je suis joyeux', 'je suis en colère', parce que ce 'je' n'existe pas. Il y a la pluie, mais personne qui pleut. Il y a la souffrance et la joie, mais il n'y a pas de 'je'. C'est la discrimination, vikalpa en sanskrit. Nous croyons qu'il y a deux choses opposées, deux extrêmes, comme la souffrance et le bonheur, l'être et le non-être, le gauche et le droit, le haut et le bas. En regardant ce marqueur, nous voyons le gauche et le droit. Nous croyons que le gauche et le droit sont deux réalités séparées, que les deux choses s'opposent, que les deux existent indépendamment. Mais en regardant profondément, nous voyons que le droit dépend du gauche pour se manifester. Sans le gauche, il n'y aurait pas le droit, et sans le droit, il n'y aurait pas le gauche. De ceci, cela naît, et de cela, ceci naît. Le gauche dépend du droit pour se manifester, et vice-versa. C'est l'inter-être, la co-existence. Le gauche ne peut pas exister par lui-même. Le gauche doit co-exister avec le droit. Et le droit ne peut pas être par lui-même. Le droit doit être basé sur le gauche afin d'exister. Il est né de l'autre, et en retour il faut naître l'autre. Né de ceci, et donnant naissance à ceci. C'est l'inter-être, la co-existence. C'est très important. Alors comment pratiquer pour que ce ne soit pas seulement de la théorie ? La pratique, c'est que quand la souffrance se manifeste, il faut la regarder et voir que cette souffrance se manifeste à cause de nombreuses conditions qui se rassemblent. La souffrance se manifeste à cause de l'idée du soi. Sans le concept du soi, la souffrance n'a pas assez de conditions pour se manifester. Quand on dit : 'Je souffre,' c'est une erreur. Comme dans notre exercice : il n'y a que la respiration, il n'y a que l'assise. Il n'y a pas de respireur, il n'y a personne qui s'assoit. Il n'y a que la souffrance, il n'y a que le bonheur, il n'y a personne qui souffre, et il n'y a personne qui soit heureux. Il faut voir cela. Quand la souffrance se manifeste, nous voyons que la souffrance se manifeste en raisons de nombreuses conditions qui se rassemblent. Quand le bonheur se manifeste, on voit que le bonheur se manifeste en raison de nombreuses conditions qui se rassemblent. Il ne faut pas dire : 'Je suis heureux', mais :'Il y a la joie qui se manifeste en raison de ces conditions.' Et la discrimination entre la souffrance et le moi, lorsqu'on voit ces deux choses comme séparées, est une vue erronée. C'est aussi vikalpa, l'imagination, la construction mentale. Alors quand nous avons la vue juste sur de nous-même, quand nous nous regardons, nous voyons que nous ne sommes pas une réalité inchangeante, permanente, mais que nous sommes un courant continuel et interdépendant, et nous sommes libérés de l'idée du soi. Et en regardant ce courant continuel, nous voyons les faiblesses et les qualités, et nous voyons qu'elles ne sont pas à nous, à un soi séparé, mais qu'elles ont été transmises par nos ancêtres autres générations. Ainsi nous sommes libérés des complexes et nous pouvons nous accepter. Nous sommes en paix, et l'autre personne à côté va se sentir bien aussi, parce que nous arrivons à nous accepter. Et naturellement nous pouvons accepter les autres aussi. Si nous regardons une autre personne, nous voyons l'autre personne comme un courant continuel, sans soi séparé. Ses faiblesses comme ses qualités ont été transmises par ses ancêtres, et nous les acceptons. Nous nous sentons bien, nous ne faisons plus de reproches, nous ne sommes plus en colère. Alors les deux choses inter-sont. Celui-ci fait naître l'autre, et l'autre engendre ceci. Quand Dieu dit : 'Que la lumière soit', la lumière dit : 'Je dois attendre.' Dans le bouddhisme, il y a un très beau terme : l'attente mutuelle. Quand Dieu dit : 'Lumière, apparaît !' la lumière répond : 'Je dois attendre', et Dieu demande : 'Qu'est-ce que tu attends ?' - 'Je dois attendre les ténèbres, et nous allons nous manifester en même temps.' Les deux vont apparaître en même temps, parce que sans les ténèbres, il n'y aurait pas de lumière, et sans lumière, il n'y aurait pas les ténèbres. Et Dieu dit : 'Mais les ténèbres sont déjà là, pourquoi attendre ?' 'Mais si les ténèbres sont là, je suis déjà là.' C'est comme le gauche et le droit : 'Gauche, apparaît !' - 'Mais je dois attendre le droit.' - 'Mais le gauche est déjà là.' - 'Alors je suis déjà là.' Comprenez-vous ? Et toutes les paires d'opposés comme la naissance et la mort, l'être et le non-être, l'intérieur et l'extérieur, le sujet et l'objet sont pareils. Les deux se manifestent en même temps. On ne peut pas dire que l'un existe en premier, et que l'autre apparaît après. Dès qu'il y a le haut, il y a déjà le bas. Dès qu'il y a le gauche, il y a déjà le droit. Sans le gauche, il n'y aurait pas le droit. C'est l'attente mutuelle, c'est la symétrie, c'est la super-symétrie.

 

Trente-neuvième verset :

39. Le mental impur naît et cesse
Ensemble avec les afflictions.
La libération n'a lieu
Ni avant ni après les afflictions.

 

Ce mot 'mental' signifie manas. Et basé sur le manas, il y a la conscience mentale. La conscience mentale parfois fonctionne, parfois cesse de fonctionner. Mais le manas fonctionne tout le temps. Le manas est impur parce qu'il a toujours tendance à s'attacher, à s'accrocher à la fausse perception qu'il y a un soi séparé permanent. Au lieu de dire : 'La souffrance se manifeste,' il dit toujours, 'Je souffre.' Quand la joie apparaît, il dit toujours : 'Je suis joyeux', il ne dit jamais, 'la joie se manifeste', ou 'la souffrance se manifeste'. Le manas a la tendance à chercher les plaisirs et à fuir la souffrance. Le manas n'a pas de vision profonde. C'est la septième conscience. Elle ne voit pas le danger dans la recherche des plaisirs. Il ne sait pas que la souffrance joue un rôle éducateur. Il a peur de la souffrance et il n'apprend pas d'elle. Il ne connaît pas le principe de la modération. Le manas est impur. Il croit en un soi permanent et inchangeant. Sa nature est de mesurer, de calculer. Mesurer comment avoir plus de plaisirs, mesurer comment fuir la souffrance, mais il n'a pas la capacité de voir que dans ces plaisirs, il y a aussi de graines de souffrances, et il ne voit pas non plus qu'il peut apprendre beaucoup de choses précieuses de la souffrance. La cogitation, réflexion, du manas. C'est le manas, la septième conscience. La conscience du mental est la sixième conscience. Le manas fonctionne tout le temps, tandis que le mental fonctionne ou cesse de fonctionner. Quand nous dormons et que nous sommes dans une période où il n'y a pas de rêve, la conscience mentale cesse de fonctionner. Quand nous sommes dans le coma, la conscience mentale cesse aussi de fonctionner. Ou bien quand nous sommes dans le samadhi, la concentration parfaite, la conscience mentale cesse aussi de fonctionner. Mais la base de la conscience mentale, c'est à dire le manas, silencieusement, jour et nuit, s'accroche toujours à la conscience du tréfonds comme à un soi séparé. Toutes les afflictions naissent et meurent ensemble avec le manas, à cause de l'attachement au soi, à cause du manas impur qui fonctionne tout le temps, les afflictions naissent et meurent ensemble avec les manas. Ce verset est difficile à comprendre. Si nous voulons vraiment nous libérer des afflictions comme l'avidité, la colère, l'arrogance, la tristesse, la jalousie, l'angoisse, le désespoir, si nous voulons mettre fin à tout cela, il faut voir la vérité de 'ni-avant ni-après'. Nous pourrons mieux comprendre ce verset après avoir vu le quarantième verset.

 

Quarantième verset :

40. Ce n'est pas après la naissance de ceci
Que la pureté va naître.
Ce phénomène qui avant était pur
Est appelé 'libre des affliction.'

 

Cela concerne la paire afflictions et éveil. L'éveil signifie l'absence d'afflictions. D'un côté, ce sont les afflictions, la souffrance, de l'autre côté, c'est la libération, l'éveil. Alors ce verset signifie qu'il ne faut pas croire qu'il existe les afflictions en premier, et que grâce à la pratique, il y a la libération, l'éveil, ensuite. La souffrance et l'éveil existent en même temps, comme les ténèbres et la lumière. Les afflictions sont comme les ténèbres, et l'éveil est comme la lumière. Selon la vue de l'inter-être, s'il y a les ténèbres, la lumière est déjà là. Comme s'il y a le gauche, le droit est déjà là. Ce n'est pas que le gauche est là en premier et que le droit vient après. Ce n'est pas que les afflictions existent d'abord et que l'éveil existe après. Donc les afflictions et l'éveil se manifestent en même temps. Il ne faut pas croire que les afflictions existent d'abord, et que l'éveil vient après. Il ne faut pas comprendre l'éveil dans ce sens. Dans le bouddhisme mahâyanâ, on dit que la souffrance est l'éveil. La naissance et la mort sont le nirvana. Il y a aussi la paire d'opposés de la naissance et la mort, c'est à dire le cercle du samsara, et le nirvana. Nous savons que le but de notre pratique est de transcender la naissance et la mort pour parvenir au nirvana. Nous avons tous entendu dire ça, n'est-ce pas ? Mais selon ce verset, la naissance et la mort n'existent pas en premier, et on ne parvient pas au nirvana ensuite grâce à la pratique. Non. Parce que selon les enseignements de l'inter-être, dès qu'il y a la naissance et la mort, il y a le nirvana : ce sont deux aspects d'une même réalité, comme le gauche et le droit, le devant et le derrière, le haut et le droit. Alors Dieu dit : 'Lumière, apparaît !' Et la lumière répond : 'Je dois attendre.' 'Qu'est-ce que tu attends ?' 'J'attends les ténèbres pour apparaître en même temps.' 'Mais les ténèbres sont déjà là'. 'Donc je suis déjà là. Je n'est pas besoin d'apparaître.' C'est l'inter-être. Donc la naissance et la mort et le nirvana sont deux facettes d'une même réalité. Dans la littérature bouddhique, nous entendons souvent dire que le nirvana, la naissance et la mort ne sont que des fleurs dans l'espace. Ce ne sont que des fleurs dans l'espace, il ne faut pas croire que ce sont deux réalités différentes. Ce sont deux facettes d'une même réalité. Comme quand nous parlons de la dimension historique et de la dimension ultime, ce ne sont pas deux choses séparées. Comme quand nous parlons des phénomènes et des noumènes, quand nous parlons des vagues et de l'eau. Les vagues et l'eau sont deux facettes d'une même réalité. Sans vague, il n'y aurait pas l'eau, sans l'eau, il n'y aurait pas de vague. On ne peut pas dire que les vagues n'existent pas avant et que l'eau vient après. Par exemple, quand nous regardons un nuage, au début, nous voyons que le nuage naît et meurt, parce que nous regardons du côté des phénomènes, du côté de la dimension historique. Mais du côté des noumènes, du côté de la dimension ultime, nous voyons que le nuage ne traverse pas la naissance et la mort. Quand nous voyons la naissance et la mort, nous avons peur, nous ne sommes pas en paix, mais en regardant profondément le nuage, nous voyons que le nuage n'est jamais né et ne mourra jamais. Il est impossible que le nuage, à partir de rien, devienne quelque chose, et qu'à partir de quelque chose, il devienne rien. En regardant le nuage, nous pouvons voir le monde des naissances et des morts. En le regardant, nous pouvons aussi voir le monde de la non-naissance et de la non-mort. Et c'est pareil en ce qui concerne la naissance et la mort et le nirvana. Cela dépend de notre manière de regarder. Sans la vue juste, nous voyons seulement la naissance et la mort, la souffrance, mais avec la vue juste, nous pouvons voir la non-naissance et la non-mort, et le nirvana. Et c'est pareil en ce qui concerne la souffrance et l'éveil.

 

(On revoit ici le trente-neuvième verset). 'Le mental impur naît et cesse ensemble avec les afflictions. La libération n'a lieu ni avant ni après les afflictions.' Nous souffrons parce que nous sommes attachés au soi, à la vue d'un soi séparé, à cause du manas impur. Mais dans ce verset, il est dit qu'il n'y a ni avant ni après. La souffrance n'existe pas en premier et le nirvana ensuite. Dès qu'il y a la souffrance, il y a l'éveil. Rien n'existe en premier. Ces deux choses ne sont que des concepts. Et quand on réalise la compréhension parfaite, nous ne courrons plus après l'éveil, parce que la souffrance est l'éveil, et l'éveil est la souffrance. Le nirvana se trouve dans la naissance et la mort. Un étudiant a demandé à son maître zen vietnamien, pendant la dynastie Lý : 'Cher maître, où puis-je trouver la non-naissance et la non-mort ? Parce qu'une fois établis dans la non-naissance et la non-mort, nous sommes en paix.' Alors le maître a répondu : 'Tu peux trouver la non-naissance et la non-mort au coeur des naissances et des morts. Tu peux trouver le nirvana au coeur des naissances et des morts. Tu peux trouver l'éveil au coeur de la souffrance. Si tu fuis la souffrance, tu ne trouveras pas l'éveil. Si tu fuis la souffrance, tu ne trouveras jamais le bonheur.' C'est ça, ni avant, ni après.

 

Ce n'est pas parce que ces phénomènes-ci sont déjà nés, ce n'est pas parce que les afflictions sont déjà là, que ce phénomène-là, pur, que quelque chose de pur va naître. La naissance et la mort et le nirvana se manifestent en même temps. Quand on enlève la naissance et la mort, le nirvana apparaît. Enlever, ici, c'est une manière de dire. En regardant profondément, la naissance et la mort, on voit le nirvana. En regardant profondément la souffrance, on voit le nirvana. C'est le non-dualisme.

 

Quarante-et-unième verset :

41. Tout ce qui est impur
Est pur dans sa vraie nature.
Sans objet pur,
Comment y aurait-il un sujet pur ?

 

Le sixième patriarche a écrit un verset où il est dit :

 

'Le corps est comme un arbre de bodhi,
L'esprit est comme un miroir brillant,
Efforcez-vous de les garder toujours propre,
Et ne laissez jamais la poussière s'accumuler.'

 

Il faut un miroir pour que les poussières puissent se déposer. Les poussières sont les afflictions, et le miroir brillant est l'éveil. Et si on dit que la poussière existe avant, et que le miroir brillant existe après, ce n'est pas correct. Si l'on dit que la poussière existe en premier, que nous les enlevons, et qu'alors le miroir brillant apparaît, ce n'est pas correct. Les deux se manifestent en même temps. En regardant profondément, nous voyons que ce que nous appelons impureté, avant, était pureté. S'il n'y a pas de miroir, comment peut-on enlever les poussières afin d'avoir un miroir clair ? Alors on ne peut pas dire que les afflictions existent en premier. On ne peut pas dire que la poussière existe en premier, et que l'on doit enlever la poussière afin que le miroir brillant apparaisse. Sans objet de la purification, sans miroir à nettoyer, on ne peut pas avoir un miroir brillant.

 

Il nous reste encore trois versets à apprendre, et ensuite nous apprendrons d'autres textes.

 

(cloche)

 

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Enseignement donné le 15 Janvier 2012 en vietnamien,
transcrit par Pháp Thân d'après les traductions françaises et anglaises.